Chroniques, Regards sur le Haut Agenais

RADIO 4, la radio d’ici bien plus qu’une radio !

Radio 4 aujourd'hui

Un air de famille entre Sous Les Arcades et Radio 4

Dès la première étincelle de leur création, il y avait entre elles un même enthousiasme, la même volonté de créer un lien puissant et pérenne avec les gens d’ici, ceux des « 4 cantons du Haut -Agenais ». Deux médias s’exprimant l’un, par l’écrit, l’autre, par l’oral. C’est en novembre 1965, au sein de la MJC de Monflanquin, que naît la revue « Sous Les Arcades » dont la paternité revient à un seul homme, Claude Pons. Dix-huit ans plus tard, dans le berceau de Villeréal, naît « Radio 4 » sous une triple paternité, comme l’a raconté Jean-Paul Épinette dans la monographie rendant hommage à Claude Pons (SLA, N° 609/610 – juillet août 2016).
« Une opportunité s’offrit : Mai 1981 et la fin du monopole d’État sur la radio ».

« Et si l’on montait une radio des 4 cantons. Toi qui as fait de la radio pirate, qu’est-ce que tu en dis ? »

Claude Pons à Jean-Paul Épinette


Un an plus tard, Claude Pons et Pèire Boissière toquaient à ma porte. « Et si l’on montait une radio des 4 cantons. Toi qui as fait de la radio pirate, qu’est-ce que tu en dis ? » On sait que, jusqu’à la fin de sa vie, Claude Pons est resté fidèle à Radio 4, notamment avec son émission « Chemins de traverse ». Sa personne et son amitié avec Jean-Paul Épinette constituaient un lien naturel entre ces deux médias.

La conversion d’une parigote

Cette parigote que je connais, habituée à écouter de grands chroniqueurs sur France Inter ou de la belle musique classique sur France Musique, n’a d’abord prêté qu’une oreille boudeuse à Radio 4. Mais enfin conquise et devenue très enthousiaste, elle peut maintenant analyser les raisons de cette conversion. D’abord, Radio 4 a persisté, résisté depuis ses premières émissions en 1983, trente ans déjà ! C’est bien la preuve qu’elle répondait à un réel besoin. Jean-Paul Épinette rapporte encore, qu’en septembre 1983, une nouvelle aventure commençait en proclamant « Écoutez le pays parler ». Il s’agissait de faire en sorte que les gens du pays s’emparent des outils, qu’ils deviennent techniciens, animateurs, reporters et diffusent eux-mêmes leur propre parole. Ils l’ont fait et le font toujours, Pierre-Anthony Épinette en tête.
Parallèlement et toujours selon J-PE, Radio 4 a matérialisé son succès « par un triplement de sa zone de diffusion – quatre émetteurs du Fumélois au Duraquois – et une audience record à rendre jalouses les grandes stations de radio. »

Tout ce qui est rare et fait de Radio 4 une radio hors du commun

C’est d’abord un ton : un ton naturel, bon enfant. On ne se prend pas la tête et parfois ça rigole bien ! Un ton qui peut aussi, tout en restant simple, naviguer de l’impersonnel à l’intime, du sérieux à l’aménité, selon les émotions échangées entre l’animateur et l’auditeur.

Ce sont des infos d’intérêt général, sur la France et le monde, concises, allant à l’essentiel et clairement exprimées, ce qu’on peut apprécier quand on finit par être saturé par celles des journaux télévisés, souvent redondantes. S’y ajoutent, dans le courant des « Matinales de Radio 4 », d’autres infos, régionales celles-ci, sur des incendies, des accidents de la route, des événements plus ou moins violents à incidences juridiques ou non… qui touchent plus l’attention de l’auditeur quand elles se situent dans le Lot-et-Garonne.

C’est une publicité idéalement traitée, vraiment informative. Par exemple, s’il s’agit d’un nouveau restaurant, elle nous donne le nom, l’adresse (voire sa situation par rapport à un site ou un monument très connu), le téléphone, les jours d’ouverture et les caractéristiques de la table.

Ce sont des petites annonces locales et gratuites, concernant l’agriculture et les animaux, le matin avec Véronique…Une forme de poésie à la Prévert dans l’énumération des noms d’engins, de matériel divers dont on ignore tout quand on vient de la ville mais qui font toujours rêver la petite fille qui voulait être fermière…

C’est un traitement intime et délicat du carnet, rubrique nécrologique où on apprend tout ce qu’on a besoin de savoir sur la cérémonie dans sa totalité, avec la citation des noms des membres de la famille du défunt, sans oublier ceux des petits-enfants et arrière-petits-enfants. Ici les gens se connaissent et assistent aux obsèques.

C’est une météo forcément locale, détaillée et particulièrement utile aux agriculteurs.

C’est une présentation très complète et bien illustrée de la vie d’ici : de nouveaux épiciers qui s’installent à Lougratte, le lundi 4 avril ; un tour d’horizon emballant sur le petit village de Prayssas (un millier d’habitants seulement), réputé pour l’importance de son marché aux truffes et surtout pour la qualité exceptionnelle du son de son nouvel auditorium, apprécié et recherché par de très célèbres musiciens du monde entier. C’est aussi, dans le 47 et départements alentours, des invitations à toutes sortes de manifestations : rencontres sportives, foires à la brocante et vide-greniers, sorties culturelles (cinéma, théâtre, concerts…) sans oublier les bals ou les thés dansants, comme à Sérignac-Péboudou tout récemment, avec un fameux orchestre d’accordéon.

C’est un bel esprit d’équipe, jeune, joyeux et dynamique, qui emporte l’auditeur, pour un bon moment, loin du Covid et des horreurs de la guerre en Ukraine, avec des boutades, des devinettes drôles à la Manu (ou autre animateur) et la bande des « Affreux Jojos », en semaine, sur le coup de midi.

C’est une émission qui n’a probablement pas son pareil dans toute la France :
« SAISONS, LE MAGAZINE DE LA NATURE« , créée et animée par Michel Hoare. Cet homme, d’abord instituteur à Cancon, a quitté l’Éducation Nationale pour se consacrer, à plein temps, à sa passion : vivre avec la nature, n’avoir de cesse de l’observer avec ses habitants, tout particulièrement les oiseaux. Il se reporte à des ouvrages scientifiques, livres ou revues dont il fournit les références pour les auditeurs qui voudraient s’y plonger et, lui même, en lit souvent des extraits d’une voix toujours juste et parfois vibrante. Depuis plusieurs semaines, par exemple, il termine ses émissions par un extrait, toujours « parlant » de la revue « La Hulotte », consacré au merle : en évoquant la chasse au sol de l’oiseau, « après un coup de balai dans les feuilles sèches », on apprend que « son ouïe est si fine qu’il perçoit le gratouillement d’une larve dans le sol. » Mais c’est encore mieux quand Michel Hoare livre ses propres observations et nous les fait revivre, surtout quand il précise auprès de quelle rivière il a rencontré tel martin-pêcheur ou sur quelles falaises, de Dordogne ou de Gavaudun, il a repéré tel grand-duc. Il organise, anime et commente des randonnées gratuites pour le public, de jour ou de nuit, comme la fameuse « Nuit de la chouette » qui a eu lieu, cette année, le vendredi 18 mars à Gavaudun, tout éclairage nocturne éteint. Cet homme, capable d’imiter le chant de la plupart des oiseaux de nos régions, s’entoure souvent d’agriculteurs amis, choisis pour leurs connaissances des terrains et des habitudes des oiseaux, migrateurs ou non, et invite, assez régulièrement, d’autres scientifiques comme, l’entomologiste Jean-Philippe Tamisier dont les dernières interventions avaient pour thème « Le pouvoir extraordinaire des parasites-manipulateurs. » Un spécialiste des insectes qui sait s’émerveiller de tout ce qu’il découvre, un discours passionnant sérieux et drôle, une volonté de s’exprimer en termes simples…
« SAISONS », cette magnifique émission, est diffusée deux fois le week-end : le samedi matin, à 9h30 et le dimanche, à midi.

Un samedi matin à ne pas manquer pour d’autres raisons : ses dialogues et ses chansons en Occitan et, après 10h, une émission très plaisante et très documentée de Pierre, ancien journaliste, sur « Les stars d’hier et d’aujourd’hui » dont il parle avec vivacité parce qu’il les a fréquentées ou, au moins, interviewées :
célébrités en tant qu’acteurs, chanteurs, musiciens (compositeurs ou interprètes). Son émission est musicalement illustrée par d’excellents airs « bluesy » ou jazzy. Puis vient le temps de l’harmonica, avec une belle sélection d’airs et de musiciens capables de réveiller de beaux souvenirs chez ceux qui les écoutaient autrefois.

Et un dimanche matin de bonheur, avec « Les plus belles chansons françaises, des années 60 à nos jours ». Un régal, pour de nombreux auditeurs sans doute, mais par-dessus tout, un cadeau incomparable, une thérapie, pour les gens âgés ! Ils y retrouvent leurs souvenirs, leurs amours et même, pour ceux qui ne peuvent plus, ou presque plus marcher, la joie d’esquisser encore un petit pas !

Elle a raison Nana :
« Quand tu chantes, quand tu chantes,
Quand tu chantes, ça va… »

Joselyne Vionnet – Sous Les Arcades n°678-679 – Avril Mai 2022