Chroniques, Coeur de pierres(s)

Cœurs de bronze à Montagnac


Stratégiquement campée sur son tertre, l’église de Montagnac a été remaniée à plusieurs reprises au cours de son histoire. De ses origines, elle a gardé une abside romane sans contreforts du XIIème siècle. La nef fut entourée de chapelles voûtées au XVIème siècle.


Enfin, des transformations importantes eurent lieu au XIXème siècle, comme ce fut le cas également pour l’église St André de Monflanquin. Au programme : rehaussement de la toiture et remplacement des lambris par des croisées d’ogives, percement de six fenêtres dans la nef et reconstruction de trois des six chapelles.

La façade à la silhouette bien reconnaissable est constituée de deux tours reliées par une terrasse sur laquelle s’élève un pignon à double arcade où s’insèrent les deux cloches (voir photos 1 et 2).

Chaque tour arbore une horloge. La tour côté cimetière abritait le dispositif de sonnerie des cloches à partir du bas de la tour. Deux orifices dans le sol de la terrasse qui permettaient de faire passer chaque corde en témoignent encore (on les distingue sur la photo 1). La deuxième tour comporte un escalier en colimaçon étroit et sombre, qui est d’abord de pierre, puis de bois et nous mène au sommet. La vue, là-haut, s’étend à 360° sur toute la région, les pechs environnants et, entre autres, les églises de Monflanquin et de Soulies.



Les deux cloches ne sont pas très anciennes. La plus grosse, fondue en 1884 par Cazes à Villefranche de Rouergue pèse 1060 kg et mesure 122 cm de diamètre (voir photo 3). Elle porte les inscriptions suivantes :
*1884, le 15 août, j’ai été donnée à la paroisse par Mr Etienne Gimel, curé.
*Parrain, Mr Jean-François Enduran, notaire
*Marraine, Madame Marie-Louise Leteneur

  • DEUM VIVUM * PLEBEM VOCO * CONVOCO COETUM DESUNCTOS PLORO PESTEM FUGO FESTA DECORO LADO

Cher lecteur, si vous êtes latiniste, n’hésitez pas à vous lancer dans la traduction de cette dernière inscription et tenez-nous au courant !

La seconde cloche date du XVIIIème siècle. Fondue en 1760 par Soyer Fr., son diamètre est de 97,5 cm et son poids d’environ 525kg (voir photo 4). Nous y découvrons une dédicace et le nom de ses donateurs :
*St Martin patron de Montagnac
*Charles-Martin de Montayral curé et prieur, archiprêtre
*Messire Joseph de Fumel seigneur du présent lieu, brigadier des armes du roy de Fumel
*1760 Madame Marguerite de Fumel marquise de Monsales Maître Jean Thibaut juge

On ne peut s’empêcher de penser aux générations de sacristains qui ont sonné les offices, les grands évènements, le tocsin et l’angélus de l’aube, du midi et du soir. Monsieur Galinou qui fréquentait l’école et le catéchisme au début des années ’30 se souvient très bien que « pour sonner les cloches il y avait 2 cordes qui pendaient jusqu’au sol à l’entrée de l’église et c’était Gilbert P. le marguillier qui en tirant sur les cordes, sonnait les angélus 3 fois par jour ! »

Depuis les années ‘50, les cloches sont électrifiées, plus besoin de la main humaine. Désormais, elles tintent pour l’heure et la demi-heure, de jour comme de nuit et, bien sûr, pour les rares offices, malheureusement plus souvent pour des funérailles que pour des mariages.



Au début du XXIème, l’état défectueux des supports des cloches et l’ancienneté du système électrique aurait pu les rendre silencieuses. Un diagnostic posé par une entreprise spécialisée conclut à la nécessité de mener des travaux de mise en sécurité : les éléments du système de support de la « Grosse cloche » qui pèse plus d’une tonne étaient à remplacer en grande partie ainsi que le battant des deux cloches dont le poids était inadapté. La restauration fut effectuée en 2004 conjointement à la mise aux normes du tableau électrique.


Ainsi, continueront-elles longtemps à rythmer le temps qui passe pour tous les habitants du village et de ses environs, qu’ils croient au ciel ou qu’ils n’y croient pas.


Merci à Annie et Jean Dupré, à monsieur Claude Galinou et au site patrimoinmonflanquin.free.fr


Michèle Rampelberg
SLA n°652 – Février 2020